mercredi, juin 25, 2008

f... lady dark lover

pour toi alors, (merde),

C'est elle mon véritable amour, la femme pas belle presque laide que j'ai rencontré un jour, que certainement je n'aime pas, que j'aime tout simplement parce qu'il est impossible de l'aimer, et même sa voix que je ne peux supporter d'entendre, celle-là, que je n'ai pas rencontré dans un bar ce qui aurait été bien, ni dans une rue sombre dans la nuit et au pire sous la pluie et avec les poubelles ces inévitables chats ces quelques voitures abandonnées plus loin devant comme on sait, qui ne boit pas ni ne fume ni ne prend de la cocaïne comme se serait préférable, qui n'a pas non plus commis ce crime dont parle les journaux et que la police poursuit et comme ça j'irai à la fameuse petite épicerie du coin en douce acheter le riz et le poisson fumé que nous aimions tant, que nous avons découvert alors avec cette complicité de toujours, que s'il n'y en a pas on se débrouille, parce que oui, parce qu'il le faut, parce que sinon, pour quelle raison paie-t-on des impôts si élévés, pourquoi merde, elle est cette femme sans cette manière si lesbienne d'arranger ses cheveux qui me plaît tellement, et qui ne me cause même pas ce désespoir beau séduisant et fécond d'être attiré, la femme que je ne tuerai probablement pas un jour parce que je serai tout simplement contrarié et fatigué et maintenant je travaille et c'est pire encore, tout porte à croire que je ne la tuerai pas, et d'un commun accord comme dans ce film de l'autre jour, elle qui n'a pas compris quand encore hier et comme dans un jeu j'ai essayé de l'étrangler et qui a protesté et a boudé comme une superficielle putain sans expérience internationale, elle est mon amour, mais pas la pute ce qui serait mieux encore, l'adorable reine des putes qui inévitablement me parlerait des clients ou n'en parlerait pas, ce serait comme ça comme un pacte secret seulement entre nous deux [...]

TANGO-HARAKIRI
de Henrique Nogueira-Vieira
Edition & etc, Lisboa, 1983.
(traduction du portugais : Pierre Delgado)