vendredi, juillet 18, 2008

L'Etat moderne créé lui-même son opposition, l'enferme dans des formes convenables et y attire les mécontents

"Avec des sociétés nouvelles, il faut employer des procédés nouveaux : il ne s'agit pas aujourd'hui, pour gouverner, de commettre des iniquités violentes, de décapiter ses ennemis, de dépouiller ses sujets de leurs biens, de prodiguer les supplices; non, la mort, la spoliation et les tourments physiques ne peuvent jouer qu'un rôle assez secondaire dans la politique intérieure des Etats modernes. Il s'agit moins aujourd'hui de violenter les hommes que de les désarmer, de comprimer leurs passions politiques que de les effacer, de combattre leurs instincts que de les tromper, de proscrire leurs idées que de leur donner le change en se les appropriant."

"C'est que vous ne connaissez pas... ce qu'il y a d'impuissance et même de niaiserie chez la plupart des hommes de la démagogie européenne. Ces tigres ont des âmes de mouton, des têtes pleines de vent; il suffit de parler leur langage pour pénétrer dans leur rang. Leurs idées ont presque toutes, d'ailleurs, des affinités incroyables avec les doctrines du pouvoir absolu. Leur rêve est l'absorption des individus, dans une unité symbolique. Ils demandent la réalisation complète de l'égalité, par la vertu d'un pouvoir qui ne peut être en définitive que dans la main d'un seul homme."

MAURICE JOLY
Dialogue aux enfers entre Machiavel et Montesquieu (1864)
Allia, 1987.

Donc à lire et à relire aujourd'hui, ce livre (et les autres) de Maurice Joly où il "décrit comment Napoléon III a manipulé les milieux économiques, la presse, l'opinion publique, les syndicats, les milieux ouvriers, le peuple, etc, pour établir les bases solides d'un pouvoir qu'on pourrait qualifier de totalitaire. Selon l'auteur, l'empereur a fait du peuple français un peuple d'esclaves, oublieux de sa liberté et consentant à tous les asservissements."